23 Janvier 2023
Olivier Fouquet (LMB)
C’est difficile d’y croire
Mais c’est encore plus difficile de ne pas y croire
Comme noté par B. Mazur dans l'essai Conjecture (Synthèse, 1997),
le statut mathématique du terme Conjecture a changé radicalement
aux alentours du premier quart du siècle dernier :
regardé avec méfiance sinon dédain avant 1900,
il fait son entrée sur la scène dans les années 1920
pour devenir omniprésent voir dominant
dans certaines branches des mathématiques, après les années 1940.
Ce renversement de la position épistémologique du terme
– d'une périphérie marginale réprouvée au centre focal de l'attention –
semble inséparable du tournant structuraliste en mathématiques
(ou du moins dans certaines branches de celles-ci)
et (sans présumé de rapport causal cette fois-ci)
de l'ascension relative d'une épistémologie
pragmatique et cognitive des mathématiques.
Pourtant, le rôle architectural
des grandes conjectures en géométrie arithmétique
me semble poser un problème épistémologique spécial et ardu
à de telles conceptions des mathématiques et à leurs ontologies.
L'exposé discutera de ce problème et de l'éclairage qu'il apporte
sur la recherche mathématique et s'appuiera plus spécifiquement
sur les conjectures de Weil (et leurs preuves),
sur la preuve par Coates-Wiles de certains cas
de la conjecture de Birch et Swinnerton-Dyer,
sur la formulation des conjectures de Kato,
sur les valeurs spéciales des fonctions L,
et sur la conjecture de Fontaine-Mazur.